Cassandra
Je suis épuisée et terriblement fatiguée, je n’ai pas eu une seule bonne nuit de sommeil depuis que nous avons déménagé. Tout le monde me dit de ne pas me préoccuper, que les choses vont s’arranger etc. etc. Je le sais. Je sais que les choses s’arrangent, mais je ne peux pas m’empêcher d’être inquiète.
Quand nous vivions seuls, je ne dormais pas non plus. D’habitude je dors 4 heures par nuit, quand j’y arrive. Mais là, j’avais peur de me réveiller et de trouver Marc en pleine crise cardiaque ou ayant besoin de moi. Malgré ces angoisses, j’y suis arrivée. J’arrive à travailler et à m’occuper de Marc. Cela me stresse beaucoup, mais je continue.
Je me sens comme bloquée et c’est ça qui m’use car je suis une personne active. Je me dévoue pour Marc, mais aussi pour les autres. C’est donc pour me faciliter la vie que nous avons déménagé. Des dizaines de personnes comptaient sur moi tout le temps, moi je n’avais personne sur qui m’appuyer. Déménager a diminué ce poids.
Je ne réalise qu’aujourd’hui que j’étais tout le temps fatiguée, de mauvaise humeur et que le manque d’aide de la part des autres me rendait dépendante à mon tour. J’en avais besoin pour continuer à vivre.
Aujourd’hui, j’essaye de me comprendre. Je ne travaille plus. Et même si je fais plein de choses, je ne me sens pas productive.
Marc a tout fait pour retrouver son indépendance. Je l’ai laissé faire avec son ami… Ils faisaient ce qu’ils voulaient. Je voulais juste savoir s’il prenait ses médicaments (il me tenait régulièrement au courant de chaque prise), pour le reste il vivait sa vie. Jouer aux jeux vidéo, regarder des dessins animés puis encore les jeux vidéo… Mon mari est un joueur !
Ça c’est génial ! Il n’avait jamais voulu approcher un jeu vidéo auparavant. Il ne voulait rien faire. Il était dépressif. Je suis contente qu’il soit heureux et motivé de faire quelque chose… quoi que ce soit !
De mon côté, je ne me sens pas très motivée. Je crois que c’est la raison pour laquelle j’ai souvent des crises de panique et que je n’arrive pas à dormir. Ce qui est triste, c’est que je voulais faire plein de choses. J’avais des projets : écrire, prendre des cours, finir de lire des livres, en commencer d’autres. Mais je n’ai aucune motivation pour mener tout cela à bien.
La plupart du temps, je m’oblige à faire des siestes d’au moins cinq minutes, même si je n’arrive jamais à sortir mes préoccupations de la tête : Marc, l’assurance maladie, le ménage…
Aujourd’hui Marc est allé voir son nouveau médecin pour la première fois. Jusqu’à la dernière minute, nous n’étions pas sûrs d’être reçus. Nous avions décidé de passer par les urgences et de faire un IRM sur place si jamais il ne nous recevait pas. J’espère que la raison pour laquelle je me sens paralysée disparaîtra après ce rendez-vous. J’espère pouvoir dormir cette nuit. Ce rendez-vous est très important pour moi.
Cassandra
J’aime mon mari. Je répète souvent cette phrase, à haute voix ou à moi-même. J’aime mon mari. Mais il me pose beaucoup de problèmes. Il est très drôle. C’est la personne plus gentille et aimable que je n’ai jamais rencontrée. Avant de tomber malade, il adorait faire du sport, il ne faisait que ça. Son plaisir était de soulever des kilos et des kilos tandis que mon plaisir à moi, c’était plutôt de soulever des beignets.
Il a horreur de prendre ses médicaments. Il n’aime pas dire comment il se sent. Ses émotions ? Il les garde pour lui. Comme Marc fait à contre cœur tout ce qui concerne sa santé, j’ai créé ma fameuse liste de vérification. Après avoir été à autant de rendez-vous médicaux, j’ai appris comment et quoi noter sur la liste pour ne pas oublier de poser certaines questions au médecin et aller à l’essentiel.
Lynda
Je m’appelle Lynda et j’ai 57 ans. Je me suis occupée de mon père de 85 ans pendant plusieurs années. Mon mari Jim et moi, sommes encore de jeunes mariés. Jim travaille à temps plein. Moi, je suis en congé longue maladie depuis cinq ans et demi à cause d’une forte ostéopathie et d’un problème au dos.
Je pense écrire tout cela dans un blog, pour parler des divers aspects de mon expérience d’aidant et du stress lié au fait d’être mariée et de vivre avec mon mari dans ma maison d’enfance avec un père très difficile. Mon mari et moi, nous avons emménagé avec mon père cette année pour pouvoir nous occuper de lui. Nous avions commencé à en parler bien avant, mais nous voulions le faire par étape. Nous vivions alors à 45 minutes de la maison familiale où vit mon père.
Au départ, mon père était soigné pour un cancer de la prostate, un début de démence et quelque problème de cœur. Il a pratiquement arrêté de conduire après avoir admis qu’il commençait à se perdre (cette décision fut pour lui un véritable soulagement). J’allais donc au moins une fois par semaine chez lui pour lui apporter ses courses et pour l’accompagner chez son médecin.
Nous lui avons expliqué que nous étions inquiets qu’il vive seul, qu’il était devenu nécessaire qu’il ait quelqu’un pour l’aider à la maison. Nous avons discuté d’une aide à domicile, mais il n’était pas convaincu. Nous avons donc décidé d’emménager chez lui après avoir rangé et trié nos meubles et les siens. Nous voulions nous accorder du temps pour vendre certains meubles, pour pouvoir nous faire de la place chez lui.
Mais son état de santé s’est aggravé plus vite que prévu et il a dû être hospitalisé. Nous avons emménagé chez lui de suite à sa sortie de l’hôpital, car il ne pouvait plus vivre seul. Pour nous, ce fut stressant d’emménager ainsi ! Le premier mois s’est écoulé comme si nous étions dans un nuage. Ça me semblait tellement difficile de m’habituer à cette nouvelle situation, de trouver mes affaires et de nouvelles habitudes à trois. Aujourd’hui, trois mois ont passé depuis le déménagement.
Mon père, Jim et moi nous allons tous chez le même médecin, ce qui est bien pratique ! C’est une femme, je la connais depuis 25 ans. Elle nous a suggéré de nous adresser à une maison de retraite et a contacté un établissement : ce fut un réel soulagement pour nous lorsque nous avons appris qu’il était admis. Et pour moi, c’est rassurant de savoir qu’il y a quelqu’un que je peux appeler 24h sur 24 si j’ai une question ou un problème.
Voilà une liste qui contient les questions que je voudrais traiter dans mon blog :
– Affronter la négativité de mon père et être capable de m’amuser avec lui.
– Affronter la maladie
– Réussir à ne pas trop stresser et à m’occuper de moi
– Affronter ma peur du futur
– Essayer d’entretenir ma vie personnelle et notre vie sociale.
– Essayer de voyager sereinement
J’adore écrire et je pense que ce blog sera thérapeutique pour moi
Evelyne 30 juillet 2013
Ma mère est très contente d’avoir une indépendance financière. Mon mari et moi faisons de notre mieux pour qu’elle puisse sortir et qu’elle ait toujours de l’argent sur elle. Ma famille ne comprend pas pourquoi nous continuons à lui donner de l’argent puisqu’« elle ne va jamais nulle part ». Pourtant, elle est contente d’avoir un peu de liquide sur elle. Certains me demandent : « pourquoi l’amenez-vous tout le temps faire les courses avec vous? » Mais parce qu’elle aime le faire et nous sommes heureux quand on la voit choisir ce qui lui fait envie !
J’aime partager ces moments avec a mère !
De Paul
(Le texte suivant est une partie d’une conversation que j’ai eue avec ma grand-mère.)
Grand-mère dit de façon énergique. « Ne me stresse pas, j’arrive ». Nous sommes à table en train de parler de mon prochain voyage en République Dominicaine. J’ai préparé ma grand-mère pour ce voyage depuis plusieurs jours en lui rappelant que je ne partais que pour une semaine. Elle me demande : « Qui s’occupera de moi quand tu ne seras pas là ? ».
Nous avons revu ensemble le programme pour la semaine, inscrit sur un tableau.
« Eric, il arrive aujourd’hui et il restera les deux premiers jours de la semaine. Il m’a téléphoné il y a quelques jours, il était ravi de venir passer du temps avec toi ».
« Vendredi, dit-elle, c’est maman qui vient et elle restera toute la semaine. Et avant même que tu t’en aperçoives je serai déjà rentré ! »
Elle soupire. « J’espère qu’elle ne m’embête pas. Elle veut toujours que je fasse ce qu’elle dit quand elle le dit ». « Grand-mère, je te connais bien, je passe toute la journée avec toi, je sais comment tu te déplaces. Maman l’apprendra aussi. Mais tu dois être patiente avec elle, de la même façon que tu veux qu’elle soit patiente avec toi. ». Elle soupire. « J’espère juste que tout se passera bien et que les gens sauront s’occuper de moi. »
C’est alors que j’ai l’idée des « Règles de Grand-mère ». J’attrape mon Smartphone et je commence à écrire dans mon bloc note en lui demandant : « Quelles sont tes règles pour que l’on s’occupe bien de toi ? ».
« Règle 1, ne me poussez pas, je vais y arriver »
Nous ne sommes pas allés plus loin que la première règle. Je crois qu’elle avait juste besoin d’être rassurée. J’ai imprimé la Règle 1 et je l’ai mise sur le mur de sa chambre.
C’était une belle opportunité pour parler avec elle de la manière dont elle voyait les choses !